Vendredi, 2 juillet 2010
L’eau, plus que jamais une nécessité au Tchad
Des villages complètement vidés de leur population, des familles entières, hommes, femmes et enfants avec tous leurs biens parcourant des dizaines de kilomètres à la recherche d’une source d’eau… Ce sont là les images qui m’ont le plus marqué dès mon arrivée au Tchad. J’ai pu mesurer à quel point rendre l’eau accessible pouvait sauver des vies dans un pays deux fois plus grand que la France et à peine peuplé d’11 millions d’habitants.
A 5 ans de l’échéance 2015 fixée pour l’atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD)(1), le Tchad, même s’il est certain d’obtenir les résultats attendus en matière d’accès à l’eau en zone urbaine (taux actuellement de 67%), est aujourd’hui très loin de pouvoir y prétendre pour la zone rurale.
Le seul problème est que la population du Tchad est à 75% rurale soit les ¾ de la population totale. La couverture en matière d’accès à l’eau potable en zone rurale est aujourd’hui de 30% en moyenne, avec des variations qui vont jusqu'à 13% dans certaines régions(2).
Si on considère les 8 250 000 habitants vivant en zone rurale, on peut estimer à 5 775 000 le nombre de tchadiens qui n’ont toujours pas accès à l’eau potable.
Cette situation est d’autant plus dramatique que le Tchad est confronté depuis quelques années à une sécheresse cyclique qui a gravement réduit la pluviométrie dans la zone sahélienne, passant d’une moyenne de 300-350 mm à 150 mm seulement ces dernières années.
Ainsi, ce sont des centaines de milliers de personnes que l’on croise aujourd’hui à travers tout le pays parcourant des centaines de kilomètres avec pour seule préoccupation trouver de l’eau.
Ces familles qui vivent au rythme des saisons, sont obligées de quitter leurs villages pendant les périodes de soudure et de se déplacer sur des centaines de kilomètres à la recherche de cette ressource si précieuse. Ils se déplacent ainsi, hommes, femmes, enfants, bétail et parcourent parfois jusqu'à plus de 100 kilomètres.
Je me rappelle encore de cette mère de famille croisée dans un village du Nord du pays, qui ne vivait que de lait car elle ne disposait d’aucune goutte d’eau pour faire la cuisine.
Au-delà des risques liés à la consommation de l’eau impropre - première cause de mortalité chez cette population - le manque d’accès à l’eau potable a d’autres conséquences négatives qui réduisent tout espoir de développement pour le pays. Ces effets néfastes concernent particulièrement les femmes et les enfants.
Pour les femmes, toutes leurs activités se limitent à la recherche de l’eau, ce qui les empêche de mettre en place tout autre type d’initiatives et notamment des activités génératrices de revenus.
Quant aux enfants, aucune chance d’aller à l’école ni d’avoir des loisirs parce qu’ils doivent aider à la corvée de l’eau dès leur plus jeune âge.
Le gouvernement tchadien, dans le schéma directeur de l’eau réalisé en 2002, avait estimé à 15 328 le nombre de points d’eau qui devaient être réalisés entre 2002 et 2010 pour espérer atteindre les OMD à l’horizon 2015. Aujourd’hui, on est encore loin du compte.
Outre le problème d’accès à l’eau potable, ces populations subissent les conséquences de la crise alimentaire qui n’a pas épargné la zone sahélienne du Tchad, avec des crises nutritionnelles graves dans certaines régions. Dans le Kanem par exemple, le taux de malnutrition aigue global a atteint 20% de la population, dépassant largement le seuil d’urgence de 15%(3).
Nous avons aussi assisté à la perte d’une grande partie du bétail, sans parler de tous ces conflits entre éleveurs et pasteurs pour le contrôle des rares points d’eau existants ; conflits qui conduisent souvent à des pertes en vies humaines.
L’intervention du Secours Islamique France au Tchad : une réponse efficace avec un coût moindre.
Implanté au Tchad depuis Février 2008, le Secours Islamique France se positionne aujourd’hui parmi les ONG leaders en termes d’hydraulique villageoise. En moins de 2 ans de présence et avec un rythme très soutenu dans la réalisation de forage à motricité humaine - appelé aussi forage à pompe manuelle - le Secours Islamique France a aujourd’hui à son actif la réalisation de 163 structures hydrauliques dans les zones les moins couvertes. La pertinence du choix des forages à pompe manuelle se trouve dans la facilité de leur mise en place, mais aussi dans leur coût peu élevé, 3 à 6 fois moins cher qu’un forage mécanisé.
Ainsi, grâce à l’accès à l’eau potable en quantité et qualité suffisantes, plus de 70 000 personnes ont vu leurs conditions de vie considérablement améliorées.
Aujourd’hui, le Secours Islamique France est déterminé à renforcer son action dans le domaine de l’eau et l’assainissement au Tchad car cette problématique est plus que jamais d’actualité.
La demande est aujourd’hui 100 fois supérieure à l’offre des ONG et autres organismes sur place. Toutefois, une mobilisation de tous les acteurs (gouvernement, ONG, bailleurs, donateurs privés et autres bienfaiteurs) permettra d’améliorer progressivement les conditions de vie de ces millions d’hommes, de femmes et d’enfants ; et faire en sorte que le Tchad soit présent au rendez-vous des OMD.
(1) Objectif 7, Cible 10 des OMD : Réduire de moitié, d'ici à 2015, le pourcentage de la population qui n'a pas accès de façon durable à un approvisionnement en eau potable salubre.
(2) Source : 9ème rapport du Fonds Européen de Développement.
(3) Source : OCHA - Bureau de Coordination des Affaires humanitaires des Nations Unies
Modou DIAW,
Responsable de Programmes du Secours Islamique France au Tchad
Interventions du Secours-Islamique France au Sahel
Du Sahel au G8 : s’engager réellement pour assurer la sécurité alimentaire des plus vulnérables
COMMUNIQUE DE PRESSE
Plusieurs organisations humanitaires appellent à redoubler d'efforts pour venir en aide aux 10 millions de personnes touchées par l'insécurité alimentaire en Afrique de l'Ouest
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