COP 29 : Aider les plus vulnérables à s’adapter aux changements climatiques
Pour la 6e fois, le Secours Islamique France a envoyé une délégation à ce qui est la plus importante Conférence sur le climat. Organisée cette année à Bakou, en Azerbaïdjan, la COP 29 est notamment le théâtre de négociations pour une augmentation du Fonds de financement climatique, alimenté par les pays les plus riche et les plus émetteurs / pollueurs. Pour l’occasion, le SIF y coorganisera le 20 novembre également son propre évènement voué à porter la voix des plus vulnérables
Au fil du temps, le mot « urgence » n’est plus assez fort pour traduire l’intensité du problème, et les mesures à mettre en œuvre pour lutter contre les changements climatiques. C’est en tout cas ce que suggère le Programme européen Copernicus, qui tire, une fois de plus, la sonnette d’alarme :
« Il est pratiquement certain que l’année 2024 sera la plus chaude jamais enregistrée. Pour l'éviter, il faudrait que l'anomalie moyenne de température pour le reste de l'année soit quasiment nulle. »
Pour appuyer leurs propos, les scientifiques de Copernicus l’accompagnent d’un chiffre : 1, 62°C, au dessus des moyennes préindustrielles, soit 1850. Il correspond à l’augmentation de la température mondiale entre novembre 2023 et octobre 2024 ! Une réalité d’autant plus préoccupante quand elle est en lien avec l’Accord de Paris de 2015. C’était pourtant il y a déjà neuf ans ans.
Les Etats s’étaient alors fixé l’objectif d’une réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre pour limiter à 2°C maximum le réchauffement du climat avant la fin du siècle, tout en appelant à ne pas dépasser 1, 5°C. L’an dernier, lors de la COP 28, un premier bilan avait d’ailleurs pointé la nécessité de baisser de 43 % les émissions d’ici à 2030, et souligné que les efforts actuels étaient insuffisants.
Lors de la COP28, le premier « bilan mondial » a souligné l’urgence de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 43 % d’ici 2030 pour limiter le réchauffement à 1,5°C, tout en soulignant que les efforts actuels sont insuffisants. Quant à l’ONU, elle vient de prévenir : en 2024, la planète est « au bord du gouffre ».
Le retard qui ne cesse de se cumuler ne peut avoir que des conséquences extrêmement néfastes, qui sont au cœur des débats et des négociations en cours à la COP 29, qui a débuté à Bakou (Azerbaïdjan) le 11 novembre, et s’achèvera le 22 novembre. En tant qu’ONG, le SIF a envoyé une délégation à ce qui est l’incontournable Conférence mondiale sur les changements climatiques.
LA COP 29 : QUELS ENJEUX SPECIFIQUES ?
L’an dernier, la COP28 de Dubaï avait suscité beaucoup d’espoirs en marquant un tournant décisif vers la fin des énergies fossiles. Malheureusement, un an plus tard, cela ne s’est pas encore concrétisé par des engagements tangibles. Pire encore, les pays semblent avoir été touchés d'amnésie. La COP29 doit donc envoyer un signal fort au travers des premières annonces des principaux pollueurs sur leur plan de sortie des énergies fossiles, accompagnées d’objectifs financiers ambitieux.
Surnommée la « COP de la finance » par les médias, la Conférence de 2024 porte donc essentiellement sur une réévaluation à la hausse du Fonds de financement climatique. Alimenté par les pays les plus émetteurs, il est voué à soutenir les pays en développement dans leur adaptation aux conséquences des changements climatiques, à en atténuer les dégâts, et à les aider dans leurs efforts de transition. Il est essentiel que les pays du Nord assument leurs responsabilités et honorent leur dette.
Le retard pris dans l’alimentation de ce fond avait fait vaciller la confiance des pays les plus vulnérables, puisque l’objectif fixé des 100 millions de dollars annuels (minimum) n’a été atteint qu’en 2022, plutôt que 2020 comme prévu. D’où la création d’un autre fonds lors de la COP 27 pour compenser ce manquement : les pertes et dommages.
Le Fonds de financement climatique fait quant à lui l’objet à la COP 298 d’une renégociation pour une multiplication par 10. Une fois de plus, le temps presse : dans le cadre de l'Accord de Paris, les pays doivent se mettre d'accord avant 2025 sur un nouvel objectif collectif quantifié.
Autre point très important de la COP 29, la question du genre : selon ONU Femmes, les changements climatiques pourraient provoquer la chute, d’ici à 2025, de 158 millions de filles et de femmes dans la pauvreté. C’est 16 millions de plus que les hommes ! Les problématiques de genre doivent être davantage pris en compte dans les processus d’adaptation. A Bakou, la renégociation d’un Plan d’Action genre de la Convention-cadre des UN sur le changement climatique est prévue. Des actions concrètes sont plus que nécessaires.
POURQUOI C’EST CRUCIAL ?
Parce que les populations des pays à faible revenus sont les premières victimes des conséquences du dérèglement climatique, alors qu’ils ne portent qu’une responsabilité marginale dans les émissions de gaz à effets de serre. Les pays les plus émetteurs ont donc une dette climatique à leur égard. Pourtant, selon les Nations Unies, 91 % des décès liées aux catastrophes naturelles surviennent dans les pays en développement, qui subissent de plus fouet la multiplication par cinq du nombre de ces phénomènes au cours des cinq dernières décennies.
C’est l’une des funestes conséquence des changements climatiques, et loin d’être la seule. Les chocs climatiques peuvent toucher tous les aspects de la vie des communautés vulnérables : insécurité alimentaire à cause de la baisse des rendements agricoles, destruction de maisons, déscolarisation, manque d’accès à l’eau potable, circulation de maladies hydriques, développement de conflits provoqués par la pénurie de ressources, accentuation de la pauvreté liée aux pertes de revenus causés par les dégâts, déracinement des populations qui se déplacent en massent, bien souvent à l’intérieur même de leur propre pays…
POURQUOI LE SIF PARTICIPE-T-IL A LA COP 29 ?
En tant qu’ONG de solidarité internationale, le Secours Islamique France mène à travers le monde de nombreuses actions d’urgence et des projets de développement sur le long terme. Une grande partie de ces interventions sont reliées à la lutte contre les conséquences des changements climatiques sur les plus démunis.
Ainsi, nous sommes des témoins directs de l’augmentation des risques de catastrophes (soudaines et lentes). Nous constatons aussi la raréfaction et dégradation des ressources naturelles, ainsi que leur partage inéquitable entre les communautés. La conjugaison de ces facteurs conduisent à une exacerbation des fragilités et des tensions, un accroissement des risques de protection et des violations des droits, à des déplacements ou des conflits.
Si nos équipes déploient de l’aide d’urgence pour aider les populations touchées à survivre lors d’une catastrophe, elles sont aussi dans l’anticipation. D’où de nombreux projets pour soutenir les plus vulnérables dans leur adaptation aux changements climatique, afin qu’ils soient en mesure de mieux encaisser les chocs.
Par son expérience du terrain, le SIF se doit donc de participer à un évènement tel que la COP 29 pour porter la voix des populations touchées auprès des décideurs, tout en proposant des solutions. C’est d’ailleurs la sixième fois que nous envoyons une délégation à cette conférence.
Reconnu pour son expertise, le SIF dispose d’ailleurs d’une accréditation CCNUCC, donc que le statut d’observateur des négociations nous a été officiellement accordé. En parallèle de ce suivi, notre délégation coorganisera son propre side-event au Pavillon Climat et Mobilité de la COP 29 avec le Global Centre for Climate Mobility, Africa CSID et The National Treasury (Kenya).
LE SIDE-EVENT DU SIF A LA COP 29
Le mercredi 20 novembre, le SIF propose une conférence sur les Déplacements internes liés aux catastrophes et aux changement climatiques dans les contextes fragiles et touchés par des conflits. Nous poserons alors une question : Comment accélérer la réponse et réduire le déficit de financement climatique ?
Ce choix n’est pas anodin : environ 80 % des déplacés internes à cause d’un conflit sont originaires d’un pays très vulnérable aux changements climatiques, qui exacerbent encore les risques d’instabilité. Malheureusement, les impacts sont disproportionnés pour les personnes déjà déplacées par d’autres crises.
Dans les situations de déplacement prolongé, où les personnes cumulent les vulnérabilités, les efforts de reconstruction et la réalisation d’une paix durable sont rendus très difficiles. Il est impératif de faire face à ces menaces croisées par une approche intégrée intégrant prévention, protection et solutions durables.
Plus en détails, nous souhaitons lors du side-event :
- Mettre en lumière la spécificité des déplacements internes associés aux catastrophes et les impacts néfastes du changement climatique dans les contextes fragiles et touchés par des conflits, en présentant l’expérience opérationnelle du SIF en Somalie (projet triple nexus) et en partageant nos principaux messages de plaidoyer.
- Nous visons à nous appuyer sur la mobilisation qui a eu lieu lors de la COP28 pour davantage d'action climatique dans ces contextes en nous concentrant spécifiquement sur les défis et la réponse au déplacement interne. Pour la première fois une journée consacrée à la question et le lancement de la Déclaration sur le climat, l'aide d'urgence, le redressement et la paix.
Plusieurs intervenants issus de la société civile prendront la parole. Le SIF en fera naturellement partie, au travers des constats qu’il fait en Somalie, et des solutions qu’il met en place. Dans ce pays, le mélange extrêmement toxique de catastrophes climatiques très intenses, qui se succèdent les unes aux autres, avec une insécurité permanente liée à des conflits, provoque une crise humanitaire de grande ampleur. Ensemble, nous appellerons à des actions rapides.
La liste des intervenants : Ms. Salome Owuonda, Executive Director, Africa Centre for Sustainable and Inclusive Development ; Peter Odhengo, Head, Climate Finance & Green Economy Unit, The National Treasury, Kenya ; Anzetse Were, Senior Economist and Green Finance Advisor, FSD Kenya ; Iheagwan Ikechukwu, Associate Director Augusto Nigeria ; Gorkhmaz Huseynov, SIF’s Head of Mission, Kenya and Somalia.
LE SIF EN SOMALIE
En Somalie, crise humanitaire et climatique sont liées
En Somalie, les conflits et le changement climatique (sécheresses, inondations) entraînent de graves impacts sur l’agriculture, l’élevage et l’économie, causant des déplacements massifs (1,1 million de déplacés internes en 2022).
80 % des déplacés internes dans le monde proviennent de pays vulnérables au climat comme la Somalie. Les femmes et enfants sont particulièrement vulnérables, faisant face à des risques accrus (violences de genre, conditions précaires). Sur place, le SIF adopte une approche multisectorielle et complémentaire :
Prévention et résilience : Le SIF vise à réduire les déplacements forcés en renforçant la résilience des populations vulnérables et en réduisant leur exposition aux risques.
Approche Nexus : Combiner les réponses humanitaires, de développement et de paix pour renforcer les moyens de subsistance des communautés agro-pastorales, par exemple le long du fleuve Juba (formation sur l’agriculture régénérative, gestion de l’eau, restauration de la biodiversité).
Réponse aux besoins immédiats et solutions durables : Dans des villes comme Kismayo, où les déplacements internes sont massifs, le SIF intervient en urgence pour les besoins de base (eau, nourriture, soins) et œuvre à renforcer la cohésion sociale entre déplacés, communautés hôtes et rapatriés.
Réduire les risques de déplacement en s’attaquant aux causes profondes (réduction de la fragilité, prévention des conflits, respect du droit humanitaire, adaptation au changement climatique).
Atténuer les effets du déplacement en répondant aux besoins immédiats et en renforçant la protection dès les premiers jours.
Promouvoir des solutions durables par des actions à long terme qui consolident les systèmes publics, pour que les déplacés puissent accéder à leurs droits sans discrimination.
ONG de solidarité internationale, le SIF mène des actions de plaidoyer et déploie des projets sur le terrain grâce à votre soutien.